Je
ne sais pas ce qui s'est passé lorsque j'ai entendu ta voix. J'espérais
un message écrit, je n'avais pas pensé t'entendre. C'est
la même voix et son grain, comme du papier de verre très doux,
a agi sur moi comme une main que l'on reconnaît, comme un sourire
qui découvre le visage oublié d'un ami. Je ne pouvais pas
parler. Je pleurais. Je ne pouvais pas croire que tu parlais. Mais tu
m'as
dit que rien ne changeait, que tu ne viendrais pas, que tu ne pouvais
pas,
que j'avais brisé le rêve.
Il faut que je
revienne
à cette histoire et aux carnets cachés dans le coffre du
piano. Où est-ce ? |
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« I'll
be seeing you ». La voix de Sarah Vaughan vient, modulée à
l'extrême se ficher dans mes oreilles, ce matin, sur le quai
de la station de métro en face de chez moi. « in
every place ». Je ne cache plus les larmes que je dois à cette
émotion.
J'écoute en boucle la chanson pendant le trajet qui ne dure plus
assez longtemps. Arrivé au bureau, la chanson m'a plongé
dans l'aphasie.
Au téléphone, ce
sont des mots chaotiques qui viennent et qui atteignent
difficilement
leur destinataire, qui peine en m'écoutant, qui fronce les sourcils,
qui ne peut que partager ma douleur. « I'll
be seeing you »... Je te vois.
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