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J'ai, plus jeune, connu
l'amour. J'ai connu plus jeune la forme occidentale de l'amour et
plus
précisément la forme française, culturellement française
de l'amour appliquée à ma génération. Roland
Barthes et Jacques Lacan, et aussi Marguerite Duras en avaient donné
les contours, inlassablement. Ils avaient dessiné une
forme
insaisissable,
faite de manque et d'attente, s'enracinant dans les grands récits
et s'émancipant du couple et surtout de la famille. Nous étions
beaucoup alors à nous adonner sans réelle joie à cette
forme déceptive de l'amour. Je l'ai ensuite abandonnée pour
la politique, y livrant ce qu'il me restait de libido. Quittant la
politique,
j'aurais pu retourner vers l'amour mais la forme que j'avais connue et
pratiquée n'était plus de mise. Le monde et moi avions
changé.
Je n'avais plus rien à en dire et je ne peux pratiquer que ce que
je peux nommer. Je ne voulais pas vivre comme
dans un feuilleton télévisé constitué
de saynètes micro dramatiques. et il était trop tard
pour la famille, quant au couple, mes activités de consultant en
amitié ne lui laissaient aucune chance. |