Diégèse




dimanche 28 avril 2019



2019
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Morale 118



Mathieu Diégèse














Parmi les faits récents qui tendent à conforter la thèse d'une nouvelle époque de la morale, nous pouvons citer la révolte des actionnaires du groupe Bayer, indignés de la fusion de l'entreprise allemande de chimie avec l'industriel Monsanto, producteur de semence et d'un désherbant controversé. Certes, dans un premier temps, on pourrait penser que la défiance manifestée par deux tiers de l'assemblée générale des actionnaires vient de ce que le cours de l'action de l'entreprise a baissé de trente-huit pour cent depuis cette fusion et les controverses liées au caractère nocif pour la santé de ce fameux désherbant. Cependant, l'entreprise a compensé cette baisse qui demeure strictement boursière par des dividendes confortables versés à ces mêmes actionnaires, de deux euros quatre-vingt par action. Qu'est-ce que le président de l'association de protection des actionnaires a finalement reproché au directoire de l'entreprise ? Un manque d'humilité et d'empathie. On ne pourrait espérer déclaration plus explicite pour étayer notre thèse. Appelons cependant à la barre notre ami le moraliste François de La Rochefoucauld, qui, à raison, se méfie des bons sentiments. Il nous rappellera ainsi que « L'orgueil n'est jamais mieux déguisé que lorsqu'il se cache sous la figure de l'humilité. » Notre auteur est habile, s'agissant d'une vertu présenté dans la Bible comme celle qui s'opposerait le mieux à la vanité. L'humanité est vouée à l'humilité face à la toute puissance d'un dieu unique qui lui pardonne tout en ne lui pardonnant rien, ou pas grand chose. « Où est l'humilité se trouve la charité », affirme Saint Augustin. Nous sommes donc bien au cœur, s'agissant de l'humilité du système des vertus théologales, la foi, l'espérance et la charité, lancées par Saint Paul dans sa première épître aux Corinthiens, au cœur du système moral des religions du Livre, le judaïsme, le christianisme et l'islam (et leurs avatars).

S'agissant de l'empathie, il est utile, nous semble-t-il, de rappeler que ce n'est pas une vertu et que son irruption dans l'ordre des catégories morales est récente, le début du vingtième siècle, et relève d'ailleurs davantage de la moralité. Le terme n'apparaît d'ailleurs que dans la neuvième édition du dictionnaire de l'Académie française, présenté presque comme une forgerie à partir du terme « sympathie ». Il est issu des sciences de la cognition et du psychisme et non de la philosophie morale.
Nous pouvons donc, sans grande crainte de nous tromper, voir dans le rapprochement des deux termes « humilité » et « empathie » la manifestation immédiate de l'une des caractéristiques de la néo morale de notre époque pour ce en quoi elle brouille les catégories... morales, justement. Pour faire plus bref, nous pourrions nous écrier : « on mélange tout ! »

S'agissant spécifiquement du réchauffement climatique et plus largement du développement durable, l'argument le plus souvent avancé et mis en scène est qu'il faut « penser à nos enfants ». Pensons-y donc, tout en reconnaissant qu'il ne s'agit pas là d'un appel à la morale, mais à une empathie culpabilisatrice envers des générations futures. Il s'agirait donc d'une empathie virtuelle, quasiment eschatologique, somme toute assez confortable pour ne pas avoir à modifier réellement ses comportements, c'est à dire, par exemple, protester contre une fusion avec Monsanto tout en continuant à empocher les dividendes du groupe ainsi formé.
Deuxième édition - 2019









page 118










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4e de couverture






André Malraux aurait écrit que le vingt-et-unième siècle serait spirituel, mais, la phrase est certainement apocryphe. Cependant, ce que l'auteur de La Condition humaine  aurait pu écrire c'est que ce sera peut-être le siècle de la morale.
Le terme n'avait plus bonne presse. Il faut avouer qu'il avait été galvaudé, ravalé à ce qu'il aurait fallu enseigner à l'école, dans des leçons du même nom. Dans l'univers fantasmatique des réactionnaires, la morale serait morte quelque part sur une barricade de 1968 ou dans un fourgon hippie sur une route de Katmandou. C'est que l'on aborde le plus souvent la morale par le plus mauvais bout de la lorgnette. Mathieu Diégèse, quant à lui, en philosophe rigoureux, commence par séparer le bon grain de la morale de l'ivraie de l'idéologie, et passe au crible d'une morale retrouvée les événements du temps présent. Optimiste, il y voit le grand retour d'une morale humaniste et ne veut voir dans la moralisation parfois forcée des arts et des lettres qu'un effet secondaire d'un mouvement souterrain plus puissant et bénéfique. Sa description par le menu d'une jeunesse qui aspire à davantage de morale pour le bien de l'humanité est particulièrement réjouissante.
Voilà un livre qui donne confiance dans l'avenir. Rien que pour cela, sans tarder, il faut le lire et le retenir.










28 avril







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