Diégèse




vendredi 15 novembre 2019



2019
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Accélération 319



Gustav Diégèse














Albert se souvient, ou plutôt, tente de se souvenir de son enfance : les élections présidentielles. Il était convenu que le nouveau président élu bénéficiât d'un état de grâce. Certes, il était tout autant convenu que l'une des missions des médias fût de scruter les signaux attendus de ce même état de grâce, à qui l'on donnait par convention quelque cent jours de vie. Pourquoi cent jours ? Albert s'est toujours posé la question, tant ce bail de cent jours évoquait pour lui les cent-jours de Napoléon Bonaparte, de retour inopiné de l'île d'Elbe jusqu'à son abdication après la funeste bataille de Waterloo. Donc, cent jours de grâce, tout le monde pourrait s'accorder sur le fait que ce n'est pas beaucoup. Mais, cela paraît désormais une éternité dans le contexte général d'accélération politique que connaît le monde et singulièrement la France. Cent jours après l'élection d'Emmanuel Macron, et bien que cela fût déjà la fin de l'été, on ne cherchait plus d'état de grâce, toute la population étant bien persuadée que c'était un rite du temps passé.

Il est vrai que la rhétorique des jours meilleurs promise par l'élection d'un nouveau chef a été remplacée par celle du médecin face à une épaule démise : « je vous préviens, cela va faire un peu mal, mais on n'a pas le choix. » Mais, quand il s'agit d'une véritable épaule démise et d'un véritable médecin, le soulagement, après la douleur paroxystique, arrive assez rapidement. Or, depuis quelques années déjà, le peuple a l'impression que les soins qui lui sont prodigués par le pouvoir élu, nouvellement ou anciennement élu, relèvent davantage d'une sorte de supplice chinois. On se souviendra, ou, selon les cas, on apprendra, qu'il s'agissait par ce supplice, tout en maintenant en vie le supplicié grâce à de l'opium (du peuple sans doute) de retirer peu à peu, en fines lamelles, des tranches d'organes sinon des organes entiers, avant de finir le travail par une décapitation. Les Grecs antiques avaient eux aussi inventé des supplices terribles qui avaient cependant le bon goût de demeurer mythologiques, dans la plupart des cas. Dès lors, les annonces gouvernementales relèvent davantage de promesses sacrificielles que de lendemains qui chantent, qui chanteront, qui chanteraient.

Albert ne s'est donc pas étonné d'apprendre que l'état de grâce du dernier président de la République élu au suffrage universel avait duré quelques secondes, moins de dix, selon l'observatoire officiel des états de grâce en politique, organisme très sérieux, qui a dû récemment faire l'acquisition de nouveaux instruments pour parvenir à pouvoir encore quelques mois mesurer ce qui, devenant de plus en plus court, pourrait finir par ne plus exister.









page 319










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4e de couverture






Un jour devient une minute. Une année dure quelques heures. On pourrait presque parcourir le siècle. Les plus jeunes vous regardent comme venant d'un temps révolu, d'un siècle révolu et ne font pas grande différence entre votre enfance et le moyen-âge. Alors, vous ne voulez plus perdre votre temps. D'ailleurs, il n'y a plus de temps à perdre. Car, si le temps s'accélère, qu'en sera-t-il du temps de la fin ?
Albert vieillit. Il le sait, il le sent, il le voit. Et comme la plupart des gens qui vieillissent, Albert a le sentiment que le temps s'accélère. Oui, mais voilà, pour Albert, qui, par ailleurs, n'a jamais vraiment fait comme les autres, le temps s'accélère d'une manière démesurée. Les autres ne remarquent rien, ou presque, mais lui parcourt les siècles dans tous les sens. L'accélération s'est faite dérèglement.
Gustav Diégèse nous livre un roman cocasse à maints égards. Albert, son personnage principal, est comme une boule de billard dans un espace-temps qui ne cesse de se contraindre de jour en jour.
Enfin ! Si le terme « jour » peut encore avoir un sens...










15 novembre







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