Dès le matin je sais que
c'est une
mauvaise
journée. Souvent, Je
sais effacer les
mauvaises journées mais je n'en
ai rien fait. L'épidémie est repartie avec l'automne. On ne compte
plus les variants et ils n'y aura bientôt plus de lettres de l'alphabet
grec pour les nommer. Parfois, il faudrait pouvoir ne retenir que les
bonnes nouvelles.
Alors, je reste
chez moi avec l'intention un peu déguisée de travailler le matin et
d'écrire l'après-midi. Je
n'écoute pas les conseils de Roland Barthes
qui, pourtant, affirmait : « Écrire n'est pas
sage,
en ceci, que c'est se remettre entièrement et
complètement au regard ou à la lecture - c'est la même
chose - de
l'autre. » Encore faut-il que le texte soit lu. Il n'y a aucun
risque à écrire quand le texte n'est pas lu. Ce ne sera pas dans la
presse
demain. Quel écrivain puis-je bien être ? Un écrivain de
l'ordinaire, et même du très ordinaire qui utilise un support de
souvenirs,
de mémoire et de nostalgie de façon
presque aléatoire, par le seul jeu des assonances et des allitérations,
un écrivain qui ne veut pas ajouter du drame au
drame, du
drame à ce drame. Mais
il est évident qu'il s'agit bien d'un
artifice, qu'il s'agit juste d'un artifice.
Très vite je tourne en rond. Je regarde la cheminée,
m'appuie contre les
murs, mais il est trop tôt dans l'année pour allumer un feu.
J'aborde un livre scientifique et je le repose, renonçant à acquérir de
nouvelles connaissances, car, plus tard, ces connaissances
choyées disparaissent et le monde s'en passe. Je voudrais me
blottir. N'est-ce pas en fait ce que nous recherchons
et cherchons encore, cet instant tendre où nous nous blottissions ?
Qu'il est
difficile, après toutes ces années, de savoir ce que cela veut dire ! |